Être caviste aujourd’hui

Par tradition, la définition de la filière viticole française considère les activités de production en amont, c’est-à-dire les acteurs de la viticulture, et les maisons de négoce du vin, chargées historiquement d’organiser la commercialisation des vins en dehors des régions de production.

Pour préserver l’identité des appellations régionales, les institutions mises en place par la filière se gardent bien de toute centralisation jacobine. Grâce à cette précaution, les différentes cultures régionales restent fortes, productrices d’appellations non délocalisables et spécifiques de leurs terroirs.

Les réglementations spécifiques en matière d’alcool s’ajoutant à cette histoire sectorielle, les métiers de l’aval, ceux qui commercialisent aux clientèles finales sur tout le territoire, ont eu du mal à faire reconnaître leur spécialisation.

De refontes réglementaires en refontes réglementaires, les cavistes apparaissent donc principalement, sur le plan statistique, sous plusieurs codes APE :

47.25Z Commerce de détail de boissons en magasin spécialisé (62% des points de vente de cavistes) comprenant :

  • le commerce de détail de boissons (non destinées à la consommation sur place) : boissons alcoolisées et boissons non alcoolisées.

46.34Z Commerce de gros (commerce interentreprises) de boissons (62% des points de vente de cavistes) comprenant :

  • le commerce de gros de boissons alcoolisées ;
  • le commerce de gros de boissons non alcoolisées ;
  • l’achat de vin en vrac et sa mise en bouteilles sans transformation.

Cependant, le métier a beaucoup évolué afin de résister à la pression de la concurrence et pour s’adapter aux évolutions de fond de la société française en matière de consommation et d’achat de vins. Aujourd’hui, de nombreux cavistes exercent également des activités diversifiées les classant selon les Chambres régionales de commerce dans des catégories statistiques différentes (les principales étant 4729Z –  Autres commerces de détail alimentaires en magasin spécialisé ou 5610C – activité de restauration rapide,) ce qui rend le suivi du circuit complexe.

La société d’études Equonoxe, spécialiste du suivi des Cavistes, a donc défini la profession par la formule suivante : est Caviste le point de vente physique  qui se signale comme spécialiste en boissons alcoolisées, qui est ouvert à une clientèle de particuliers et qui ne vend pas uniquement les vins issus du vignoble de son gérant.

Le métier de Caviste s’est profondément remis en cause

Jouer l’originalité par la dynamisation des signatures différenciantes

Pour se différencier de la concurrence, les Cavistes sont donc tenus de proposer une gamme de vins différente (à quelques marques phares près) de la grande surface. Cette différenciation est, d’une part, devenue nécessaire par la révolution des vignerons indépendants et a, d’autre part, été imposée par le poids des différents acteurs (même constitués en réseau, les cavistes pèsent peu en comparaison de la grande distribution).

Leur développement, et la capillarité du circuit, s’inscrit de façon parallèle au développement des vignerons indépendants, ces petits producteurs cherchant à commercialiser directement leur production, à la recherche de nouveaux débouchés, l’offre de vin s’est profondément élargie mais aussi diversifiée.

Ces petites productions ne permettant pas de satisfaire les stratégies de volumes des grandes surfaces, les Cavistes sont apparus comme la solution de commercialisation la plus adéquate.

Réussir une sélection efficiente

Compte tenu des politiques de marges réduites dans la grande distribution, les cavistes ont du adapter leur stratégie, sous peine de disparition (voir le cas de Threshers en Grande Bretagne, qui malgré ses 1200 points de ventes n’a pu rivaliser avec la grande surface dans des stratégies de volumes).

Ceci justifie l’accent mis par les cavistes sur la promotion de petits producteurs au détriment des grandes productions sur lesquelles ils sont moins compétitifs. La création de valeur ajoutée se joue donc particulièrement lors de l’achat, et oriente la sélection vers des fournisseurs associant qualité du produit et conditions de vente optimales.

Mais en matière d’approvisionnement, de nombreux modèles coexistent, du caviste indépendant qui se fie exclusivement à son palais et à ses compétences propres d’acheteur, au gérant de magasin Nicolas qui commande 100 % de son offre au sein de catalogues “maison”.

Au sein des réseaux de franchises ou de commerces associés, les cavistes conservent le plus souvent une latitude dans leur référencement ce qui leur permet d’adapter leur offre aux comportements de consommation locaux, la production régionale restant une base fondamentale dans le monde du vin.

Par ailleurs, les Cavistes traditionnels peuvent se regrouper en réseaux, ce qui leur permet de réduire le prix d’achat de certains produits.

Le conseil et de la vente assistée pour se démarquer de la grande distribution

Mais de plus en plus, la valeur ajoutée des Cavistes se concrétise lors de la commercialisation des vins. La différenciation vis à vis des grandes surfaces se fait également sur les activités de conseil et de service.

Car si la sélection de sa gamme est un point essentiel, le Caviste passe cependant le plus clair de son temps au contact de la clientèle. Afin de pouvoir la renseigner au mieux, la guider au travers de son acte d’achat, mais aussi lui transmettre ses connaissances et sa passion du vin, le commerçant caviste doit être un véritable expert du vin en général, mais aussi et surtout, des produits qu’il a choisi de vendre. Le vin est une culture qui se partage et son magasin est un lieu d’échange.

Pour ces autres éléments clés du succès de la filière, la profession a dû se former, s’instruire et développer ses connaissances pour atteindre le niveau d’expertise attendu par les consommateurs. Il est loin le temps des marchands de vin embouteilleurs de cubitainers destinés à la consommation quotidienne de « piquettes ».

Que ce soit au travers des multiples formations, ou au travers des recherches personnelles, lectures et rencontres, le Caviste, qu’il soit à son compte ou salarié, doit sans cesse nourrir sa passion du vin pour pouvoir ensuite mieux la transmettre.

Malgré une cohabitation difficile lors du développement des enseignes de grande distribution, qui ont fait disparaître de nombreux petits commerces de proximité, les évolutions réalisées par les cavistes au milieu des années 90 les positionnent désormais comme une alternative complémentaire, et non pas concurrente, à la grande distribution.