Communiquer sur les vins et alcools : des règles à respecter dans un contexte tendu

Communiquer et faire de la publicité sur des vins et autres alcools ou afin d’en promouvoir la vente demandent de se conformer à la directive Bachelot et à la loi Evin.

Ceci dépasse le simple affichage de mentions obligatoires ou des conditions générales de vente, y compris sur le web.

Un cadre à respecter

Quelque soit le support utilisé, de telles démarches nécessitent de respecter des règles afin d’éviter d’être sanctionné pour « incitation à la consommation »

Comment exister quand la règle interdit d’inciter à toute consommation d’alcool ?

Le contexte comme chacun le sait est complexe : conçue à l’origine pour lutter contre l’alcoolisme et réduire les effets sociaux de l’alcool, le cadre ouvert avec la Loi Evin il y a maintenant bientôt 30 ans a considérablement évolué afin de lutter contre l’alcoolisation des jeunes en général et protéger les consommateurs d’abus. Ces motifs sont tout à fait légitimes par ailleurs sauf que, jetant le bébé avec l’eau du bain, leur mise en œuvre a considérablement censuré toutes les formations et informations de la société sur les bons usages à transmettre et mettre en pratique afin de vivre honorablement l’ art de vivre associé à la dégustation conviviale et éduquée des produits alcooliques, vins y compris.

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En l’état actuel des choses, les juges sont en effet potentiellement amenés à se prononcer dès lors qu’il pourrait y avoir incitation à consommer, un risque que doivent prendre en compte les cavistes dans toutes leurs communications.

Ce que dit la loi sur la publicité ?

La loi permet une présentation des produits sans pour autant inciter à la consommation et limite les contenus des publicités en faveur des boissons alcooliques à leurs éléments dits « objectifs » (origine, description, mode de consommation, etc.).

Selon l’Article L 3323-4 du code de la santé publique, la publicité (…) est limitée à l’indication du degré volumique d’alcool, de l’origine, de la dénomination, de la composition du produit, (…) du mode de consommation du produit.
Cette publicité peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d’origine (…).

Elle peut également comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit. (…)

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La loi est claire à ce sujet : vous ne devez pas « inciter à la consommation » en présentant, par exemple, la consommation d’alcool comme une pratique sociale, ni même conviviale. Il s’agit donc juste d’orienter une consommation qui aurait été préalablement de toute façon décidée vers le produit vanté. Un jeu d’équilibre subtil et difficile qui pénalise les cavistes sommés de s’interdire tout renouvellement de clientèle ?

Le sujet est grave : selon de récentes déclarations, le gouvernement souhaiterait « dénormaliser » la consommation d’alcool en France, rompant ainsi le lien culturel étroit entre le vin (notamment cet art de vivre pourtant mis en avant à l’étranger). Cherche l’erreur.

(…) La publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites sont autorisées exclusivement : (…) sur les services de communications en ligne (définis comme la transmission, sur demande individuelle, de données numériques n’ayant pas un caractère de correspondance privée, ou d’un procédé de communication électronique, ou permettant un échange réciproque d’informations entre l’émetteur et le récepteur) à l’exclusion de ceux qui, par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme principalement destinés à la jeunesse, ainsi que ceux édités par des associations, sociétés et fédérations sportives ou des ligues professionnelles au sens du code du sport, sous réserve que la propagande ou la publicité ne soit ni intrusive ni interstitielle.

Des interdictions strictes

Interdiction de toute association à la jeunesse ou au sport

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Aucune communication donc auprès de medias destinés à une cible de jeunes. Si ce critère peut être jugé subjectif, les tribunaux seraient néanmoins sensibles au fait que le communicant ait effectivement cherché à vérifier si le media n’est pas concerné par cette interdiction, la consigne étant qu’un site est jugé « jeune » si au moins 30% de ces internautes ont moins de 18 ans, des seuils que seules les statistiques de connexions, imparfaites et non obligatoires mais vivement conseillées, peuvent argumenter devant un éventuel jury.

Il est donc conseillé aux professionnels de la communication de demander aux supports sur lesquels ils cherchent à communiquer de leur fournir de telles statistiques afin de se prémunir en cas de litiges.

L’autre grand interdit est d’associer alcool et univers sportif. Comme si déguster et se maintenir en bonne forme physique devenaient antinomiques … S’il ne viendrait à personne de faire une relation entre le fait de consommer de l’alcool et les compétences sportives, les opposer est aussi stupide et contredit par le nombre et la qualité des sportifs parmi les cavistes, ex-rugbymen, triathlètes ou même coureur ultra-trail comme le président  Yves Legrand lui-même.

Mais la règle est stricte : interdiction donc de paraitre sur des médias de clubs ou d’organisateurs d’évènements sportifs, et ce quelque soit la forme, une règle qui avait bien faillit rattraper Taittinger qui avait pourtant veillé à ne pas communiquer sur les site francophones à l’occasion de la dernière coupe du monde mais qu’une traduction automatique d’un site en anglais avait conduit devant le tribunal … A l’issue d’une procédure judiciaire très compliquée, les champenois avaient pu démontrer qu’ils n’avaient pas cherché à émettre vers la cible incriminée…

Sont donc également interdit pour les producteurs de boissons alcooliques (quid des distributeurs ?) les opérations de parrainage (lors de manifestations sportives, festives ou culturelles par exemple). Seul est autorisé le mécénat.

Au-delà de ces strictes interdictions de paraître, les communications publicitaires dans les autres supports se doivent de respecter des règles strictes.

Les supports non mentionnés sont interdits par la loi

Les publicités au cinéma ou à la télévision sont interdites. De même la publicité dans les publications proposées à la jeunesse ou à la radio aux heures où les enfants sont à l’écoute.
Toutefois la loi a autorisé la publicité par affichage.

Comment adapter sa communication ?

La mention du message sanitaire

Toute publicité doit être assortie d’un message de caractère sanitaire précisant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.

Face au flou de cet énoncé, qui ne comporte aucune disposition concernant les modalités d’apposition et se borne à indiquer le contenu du message, la filière viticole et l’ARPP (Autorité de régulation professionnelle de la publicité en France), ont établi un code d’auto-discipline permettant de défendre collectivement son applicabilité.

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L’usage de ce code n’est donc pas obligatoire mais rend la communication plus forte et solide.

Sur les supports écrits, il est donc vivement conseillé de faire figurer la mention suivante telle quelle « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération ».

Ce message doit être place à l’horizontal, en corps gras, avec une couleur tranchant avec le fond du message.

La taille doit être égale à 1/100ème de la somme hauteur + largeur de la publicité, avec un décalage par rapport au bord de la publicité de 2 fois la hauteur d’une lettre.

En radio, le message conseillé est « Pour votre santé attention à l’abus d’alcool ».

La publicité sur internet

En ce qui concerne les publicités, de type bannières ou e-mailing, les choses sont plus compliquées.

En effet, dans la loi, il est précisé que la publicité en ligne ne doit être ni « intrusive » ni « interstitielle ».

Ces notions sont malheureusement suffisamment floues pour être soumises à interprétation :

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  • La notion d’interstitielle peut s’appliquer aux publicités qui apparaitraient automatiquement à la consultation d’un site et qui prendraient une bonne partie de la surface de l’écran obligeant ainsi à consulter la publicité avant d’accéder au site et à son contenu.
  • Par contre, la notion d’intrusive est bien plus complexe puisque soumise à la subjectivité.

Pour les e-mailings

Faire la publicité de boissons alcoolisées devient très compliqué et dans l’absolu cela ne pourrait se faire sereinement que sur certains supports spécifiques traitant déjà des boissons alcoolisées. En termes de contenu, évitez de présenter l’alcool sous un jour positif et bénéfique, restez sur un plan purement objectif.

Quelques bonnes pratiques pour la mise en ligne sur les réseaux sociaux : Facebook

Facebook constitue un cas bien particulier au regard de la loi, son cas pose de nombreux problèmes aux juristes et aux communicants. Plusieurs grandes marques se sont vues condamnées pour des opérations promotionnelles lancées sur Facebook. On peut citer, par exemple, le cas Ricard condamné pour son opération « Un Ricard, des rencontres ».

Pour votre page, il faut :

  • Inscrire la mention légale « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé et À consommer avec modération » sur toutes les photos de produits et même dans la description de la page Facebook elle-même.
  • Mettre l’option d’administration “Restriction liée à l’âge” afin d’empêcher l’accès à la page aux mineurs.
  • Grâce à l’option d’administration “Ciblage et confidentialité des publications, filtrer les publications pour qu’elles ne s’affichent pas chez les mineurs.
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Pour des jeux concours que vous souhaitez mettre en place sur Facebook et ailleurs, suite aux décisions de justice voici quelques conseils : le jeu concours doit porter, de préférence, sur des points objectifs et techniques pour éviter de tomber dans le cadre de « l’incitation à la consommation ».

Evitez les questions de type : « Quelle est votre boisson alcoolisée préférée ? » et optez plutôt pour « d’où vient l’ingrédient principal utilisé dans cette boisson ? ».

Pour les lots, préférez les lots en rapport avec alcool mais qui ne représentent pas une incitation à la consommation tels que : les kits de sommeliers, des verres, ceci pour éviter de faire remporter de l’alcool.

Mettez, par exemple un filtre, sur un formulaire d’inscription avec une demande de certifier sur l’honneur la date de naissance afin de vous prémunir des accusations de communication vers les mineurs. Ceci a joué en la faveur d’annonceurs condamnés sur d’autres points.

Les publicités de Facebook

La plate-forme propose plusieurs types de publicité et, notamment, les publicités qui apparaissent dans le fil d’actualité des internautes. Ces publicités, qui sont efficaces, sont purement et simplement déconseillées dans le cadre de la promotion de boissons alcoolisées car elles peuvent être reconnues comme « intrusives ».

De fait, il vaut mieux privilégier les publicités positionnées dans la colonne de droite, ce qui limitera les risques d’être reconnu comme hors-la-loi.

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