Edito : ça sent le vinaigre

Nous vous présentons nos meilleurs vœux pour cette nouvelle année que nous vous souhaitons heureuse et prospère. « Neige de janvier enrichit le fermier », dit un proverbe ardéchois. Puissions-nous éviter cette année au moins la sécheresse et que dame Nature puisse enfin trouver quelques grands froids durant l’hiver pour reposer les arbres et organismes mis à rude épreuve ces dernières années et qui ont beaucoup puisé dans leur réserve.

dernière minute : les nouvelles mesures d’accompagnement des entreprises touchées par le mouvement des gilets jaunes sont en Actualité sur le site professionnel des cavistes.

Car sans repos et sans réserve, même les plus forts tomberont.

Il nous faut conserver, ou retrouver, ce sens de l’essentiel, celui qui est au cœur de la force et de l’énergie qui nous animent. Ne pas opposer les différentes facettes de ce qui fait un tout.
C’est le fil conducteur de cette nouvelle Lettre d’Informations des Cavistes.

Retrouver du calme et un peu de spiritualité

L’époque est à la fracture et à l‘enfermement dans des visions conflictuelles, dans la recherche de la différence plutôt que dans la complétude.

Bannière du Salon des vins de Loire d'Angers février 2019

Une fracture qui fait suite à une décennie que l’on pouvait qualifier de schizophrène. Gilles Lipovetsky auteur de La société de déception cité par A Charpentier (dans un article de Emarketing de 2006) décrivait une époque contradictoire « Les individus hésitent entre la déprime et l’hédonisme » du fait d’une société proposant deux faces contradictoires, « d‘un côté, celle qui promet le bonheur, et de l’autre, celle qui entraîne des déceptions, un mal-être, un mal de vivre. Il en résulte une culture à deux faces, à la fois hédoniste et ludique, tout en étant envahie par le référentiel de la santé, qui inonde à peu près tout, de notre alimentation à l’air que l’on respire, en passant par notre domicile. …


L’écrivain remarquait que si « autrefois, les fêtes étaient orgiaques, dionysiaques », aujourd’hui elles sont seulement « sympas ». De même, si du temps de nos grands-parents, il n’était pas étonnant de croiser un passant en train de chantonner dans la rue – pour son propre plaisir –, aujourd’hui, les gens le prendraient soit pour un mendiant, soit pour un fou…  « Nous sommes constamment sur un effet de balancier », remarquait un professionnel de marketing cité dans l’article.

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« Si l’attention portée à la planète est de plus en plus forte, si les individus économisent davantage, s’ils décortiquent la publicité et s’en méfient, ils s’autorisent tout de même à lâcher prise le week-end. Après une semaine passée à surveiller leur assiette, ils se permettent un dîner au restaurant. Et se consolent de leurs petits bobos quotidiens en s’oubliant dans des vagues de shopping compulsives. « 

Une décennie après, où en est-on ?

Les consommateurs accros, devenus chasseurs frénétiques de prix plutôt qu’à la recherche de biens économiques nécessaires à leur besoin, sont allés au bout de leurs illusions. Et la fin du rêve laisse place à la colère.

Les quêtes actuelles qui prennent de l’ampleur peuvent aussi paraitre contradictoires.

La nécessaire transition écologique qui s’annonce accélère la recherche de sens. Ceux qui ressentent le risque mais ne sombrent pas dans le pessimisme travaillent à retrouver en eux les ressources nécessaires pour retrouver ou restaurer la liberté et la vigueur des écosystèmes naturels …  Un travail sur soi-même, cérébral, qui peut aussi s’opposer aux violences exprimées par la partie animale, impulsive, sauvage de ceux qui expriment leur mal être venu de leur ventre et de leurs instincts non canalisés. La critique larvée des intellectuels sous jacente aux attaques anti système et anti élites exprime la rébellion formulée par des peuples qui se sentent coupés de leur cerveau. Pourtant, plus que jamais il faut réconcilier les corps et l’esprit et reprendre de la hauteur.

Blanc de Blancs

Nos gouvernants ont la lourde responsabilité de travailler à la cohérence des systèmes, dont les errements matérialistes nous mènent près du gouffre,  pour en restaurer les énergies et permettre le coup de rein salutaire qui nous évitera d’y plonger, comme un réflexe de survie liée à l’espèce.  Car la société est un organisme vivant composé de multitudes d’individus, tous différents, tous actifs, tous en interaction les uns avec les autres.

Mais les uns et les autres en ont-ils bien conscience ?

Nous ne savons encore rien

La lutte pour la survie des coraux, ni animaux, ni plantes, et la découverte d’organismes hybrides dans les grands fonds marins ouvrent de nouvelles perspectives de recherche et de compréhension de la complexité de la vie.

Les scientifiques découvrent à quel point le corps humain n’est lui-même que le fruit de l’alliance de multitudes d’organismes vivants qui ont délibérément choisi de s’associer.

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Le rôle essentiel du microbiote intestinal sur la santé modifie le regard des chercheurs tenus de raisonner en termes d’écosystèmes tous différents, tous spécifiques à la personne hôte, de la flore intestinale.

Dans le même temps, la découverte de synapses (zone de contact fonctionnelle qui s’établit entre deux neurones) dans le tube digestif confirme ce que l’on pressentait sans pouvoir le prouver : l’intestin est une survivance d’un cerveau archéologique. Dans la grande aventure de la vie, c’est l’organisation intelligente de l’énergie provenant du cycle alimentaire qui a conditionné l’évolution des organismes vivants.

La tête et le ventre sont liés et indissociables. Et ne parlons pas de l’exploration qui ne fait que commencer des champignons et autres organismes hybrides qui interviennent systématiquement à toutes les étapes de la création du vivant, au point même qu’on leur attribue un rôle fondamental dans la création de l’atmosphère originelle de la terre ?

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Ces processus complexes font aussi la magie des vins, des bières, des fromages … Des produits apparus très tôt dans l’évolution de l’Homme, parfois avant même la maitrise de l’agriculture, comme l’a raconté si merveilleusement bien le Docteur Jean-Claude Ameisen (médecin, chercheur, lors d’une série consacrée au divin breuvage dans son émission radio Sur les épaules de Darwin dans laquelle il met en perspective les plus récentes découvertes dans tous les domaines scientifiques.

Comme l’explique le chercheur, par ailleurs également directeur du Centre d’Etudes du Vivant (Institut Humanités, Sciences et Société/Université Paris Diderot) et président d’honneur du Comité Consultatif National d’Ethique, le vin, comme la bière (ou le cacao dans d’autres civilisations) ont eu des rôles extrêmement larges et structurant socialement que les nouveaux moralistes de l’abstinence veulent faire oublier. Une forme de négation des identités culturelles de ce qui fut pourtant au cœur de nos civilisations méditerranéennes et européennes.

Prendre de la hauteur par rapport à ceux qui ne veulent voir que le bout de la lorgnette

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Comment donc se contenter de recherches encore trop partielles et balbutiantes pour définir un projet de société aussi triste et destructeur de joie de vivre que l’est le Plan pour la modération communiqué par la Mildeca fin 2018 ? C’est pourtant ces réflexions qui vont servir de base aux travaux de refonte des Codes du commerce des alcools auxquels participeront les cavistes, représentés par le Syndicat des Cavistes Professionnels (voir article).

Les représentants des SCP, conviés à en discuter, y feront entendre les spécificités des cavistes … et vérifieront si quelques fenêtres de convivialité restent possibles dans le sinistre monde qui nous est proposé.

Plus que jamais, c’est en effet la carte collective qui doit être jouée. Fort de ses 1400 points de vente adhérents, qu’il s’agisse de réseaux de cavistes ou de cavistes indépendants, le Syndicat des Cavistes Professionnels portera la voix et les intérêts de toute la profession en 2019 pour lui permettre de faire face aux grandes mutations institutionnelles qui s’annoncent (notamment au niveau des branches) et aux défis commerciaux d’une société en mutation.

Pour préparer l’avenir, explorons le présent. La force des cavistes, c’est la relation qu’ils entretiennent avec leurs clientèles. Mais comment la conserver et la dynamiser face aux concurrences industrielles et digitales. C’est l’objet de réflexions qui vont s’ouvrir cette année grâce aux enseignements issus de la grande étude IPSOS sur les clientèles des cavistes. Qui sont ces clients ? Cette première Lettre d’informations des cavistes de l’année est l’occasion d’en dresser un premier descriptif détaillé (voir article).

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Qui sont-ils d’abord ? Et ensuite Que pensent-ils des cavistes ? Nous poursuivrons le raisonnement lors de la conférence qui se tiendra dans le cadre du salon Wine Paris, le lundi 11 février prochain (sur inscription). Vous pouvez télécharger une  invitation pour visiter le Salon Wine Paris en cliquant sur le lien figurant sur la bannière de la colonne de droite, sur cette même page en haut).

Il est temps en effet de bien comprendre ce qui résulte de nos propres défaillances en tant que commerces spécialisés et qui pourrait être amélioré, de ce qui concerne l’ensemble de la planète vin et alcools. Car bien que moins terrible que celui de la grande distribution, le bilan des foires aux vins d’automne côté caviste n’est pas très bon non plus. C’est le principal constat de l’enquête réalisée en parallèle du baromètre d’activité conjoncturel sur les ventes des cavistes en septembre-octobre (voir article).

L’étude complète sera progressivement publiée dans les pages réservées aux adhérents et partenaires sur le site professionnel des cavistes.

 Demain se prépare aujourd’hui

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La crise des gilets jaunes a fait exploser les cases catégorielles dans laquelle chacun classait l’autre pour le discréditer.

Ceux que l’on avait voulu enfermer dans des postures consuméristes misérables, capables du pire et notamment de provoquer des émeutes lorsque le Nutella est soldé ou de se ruer dans les rayons à la moindre injonction à consommer du type Black Friday ont finalement démontré leur liberté d’être en occupant les ronds-points conduisant à ces mêmes zones commerciales.

Et si les effets de meute sont aussi capables du pire, nombres de ces citoyens expriment aussi, parfois maladroitement, mais avec beaucoup de sincérité et de certitudes, leur souhait de préparer une nouvelle société sur des bases plus saines et plus adaptées aux vrais enjeux. Dans le même temps, la multiplication des régimes alimentaires est un signal qui ne doit pas tromper : la standardisation voulue par la grande distribution est montrée du doigt, c’est l’alimentation qui sera la clé de voute de cette transition.

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Ceux qui il y a quinze ans résumaient le Bio à un effet de mode se sont trompés. Le marché des produits sains, responsables et naturels sont sortis de leur niche marketing et deviennent un segment majeur. La grande distribution tente aujourd’hui de récupérer ces marchés, structurés par des enseignes spécialisées qui ont construit des filières d’approvisionnements, court-circuitant ainsi les modèles agro industriels standards.

La force de ces nouveaux acteurs, c’est leur éthique.

Le virage qu’ont pris les vignerons réunis dans les coopératives partenaires des cavistes (Alliance Loire, Marrenon, Estandon, Laudun-Chusclan, Plaimont, Cave de Tain et Sieur d‘Arques sont membres du club Vino Semper) atteste de la profonde mutation du modèle. Elles nous font part de leur progrès et de l’effet d’entrainement que leur dimension collective apporte aux terroirs qu’elles représentent (voir article).

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Remettre en cause un système, cela ne se fait pas en claquant des doigts. Il faut du courage et de vraies politiques volontaristes. Et l’adhésion citoyenne est indispensable à sa réussite. Sans transparence et échange entre ceux qui conçoivent les moyens de réussir le changement et ceux qui vont concrètement le mettre en œuvre, rien ne peut avancer.

Le grand débat, chez les cavistes, il passe aussi par le moment de convivialité de la bonne bouteille partagée. Le vin, et la bière, sont des lubrifiants sociaux qui facilitent la prise de parole et la circulation des idées.

“ Le vin est un profond mystère” écrivait Colette, comme le rappelle dans ses vœux Yves Legrand, président du Syndicat des Cavistes Professionnels. Alors n’ayons pas peur. Tous ensemble,  trinquons et buvons  joyeusement à l’aventure 2019.

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Pour rejoindre le SCP, n’oubliez pas de nous renvoyer votre appel de cotisation 2019 ou d’adhérer directement en ligne.